La préparation physique en question en France

Mercredi 7 Aout 2013
2 commentaires


@reuters

 
 
Il y a beaucoup de qualificatifs utilisables pour décrire le jeu des joueurs français de haut niveau, sauf un peut être : celui de joueurs forts physiquement. En effet, les joueurs français sont souvent vus par leurs homologues du circuit comme étant talentueux mais qu'il suffit souvent de mettre au combat physique pour les battre.
 
De nombreux exemples de joueurs assez durement blessés existent ce dernière années Gaël Monfils, Jo Wilfried Tsonga, Paul Henri Mathieur, mais également chez les jeunes avec Guillaume Rufin qui a déjà été opéré de la hanche à 20 ans.
 
Comment expliquer ce déficit ? C'est ce que je vous propose d'analyser dans cet article.
 

Un problème de formation dès le plus jeune âge dans les clubs

 
Avant de devenir un joueur de tennis, l'enfant doit devenir un sportif avant tout avec un objectif concernant sa santé qui doit être de savoir s'échauffer correctement en autonomie (cardiovasculaire, articulaire et les étirements) et s'étirer à la fin du cours afin d'éviter les courbatures.
 
Combien d'enseignants de tennis (AMT ou DE) prennent aujourd'hui le temps durant leurs séances ? Très peu et on ne peut pas réellement leur en vouloir car ils doivent répondre à une triple attente :
  • les formateurs qui leur enseignent qu'un enfant doit pratiquer 100% du temps avec sa raquette durant sa séance et de manière ludique.
  • Les parents qui ne payent pas l'année au tennis pour que leurs enfants « perdent du temps à s'échauffer et s'étirer »
  • les présidents de clubs qui veulent une école de tennis ou de compétition qui attire du monde et donc souhaitent enlever tout ce qui ne plait pas aux enfants.
 
Ce manque des bases de l'apprentissage sportif de base se retrouve évidemment par la suite dans les carrières futures des joueurs.
 

Le problème des « experts » auto proclamés

 
Avec ce point, on soulève un très gros soucis dans les clubs (mais parfois même au niveau des ligues) : quelle est la formation et donc la compétence des personnes qui interviennent en tant que préparateur physique ?
 
On peut lire par exemple dans les plaquettes de formation du DE, qu'un enseignant une fois son diplôme obtenu sera capable d'encadrer les séances de préparation physiques spécifiques au tennis. C'est absolument faux, et d'ailleurs, on ne retrouve dans aucun des modules de la formation un item préparation physique, ni même d'ailleurs dans la formation DES.
 
Parfois, c'est même encore pire avec des séances animées par des gens sans formation qui ne font que calquer une séance qu'ils ont réalisé en tant que sportif, avec le même contenu pour tout le monde, enfants ou adultes...
 
On peut également trouver sur internet beaucoup de sites d'autodidactes se présentant comme préparateur physique sans aucune formation sérieuse préalable...
 

Un cloisonnement trop important du tennis

 
Aujourd'hui, plutôt que d'exploiter les compétences de préparateurs physiques qui ont fait leurs preuves dans d'autres sports, le tennis a une très grosse tendance à se replier sur lui même et donc rester dans ses propres habitudes et certitudes.
 
De plus, beaucoup de gens dans les instances dirigeantes au sein des clubs, des ligues ou même de la fédération font un rejet complet des éducateurs issus de la fillière Staps ou même professeur d'EPS comme nous avons pu le voir dans la suppression des équivalences entre la filière STAPS et le DE.
 
Pourquoi ce choix ? Peut être parce que les organismes de formations n'appréciaient pas de voir arriver des Stapsiens en candidats libres au spécifique du BE et obtenir leur diplôme « gratuitement »...Dans d'autres activités (gymnastique, athlétisme et sport collectifs), ces éducateurs sont au contraire recherchés pour leur compétences pluridisciplinaires et leurs connaissances dans la préparation physique.
 
De la même manière, les enseignants de tennis voient souvent d'un mauvais œil le fait qu'un enfant compétiteur au tennis fasse en parallèle un autre sport alors que la pratique d'une autre activité est en fait plutôt bénéfique car va développer d'autres aptitudes physiques et mentale que le tennis.
 

Un problème d'objectif : la performance au centre du débat

 
Et oui, le mot est lâché : amélioration des performances. Pour beaucoup la préparation physique a pour unique visée l'augmentation des qualités physiques en vue d'être plus performant sur le terrain de tennis. De cette manière, le programme proposé sera aussi complet que le tennis l'exige avec des séquences de travail foncier, de vitesse, de force, de détente, de souplesse avec souvent pour objectif d'être le meilleur dans chacun de ses domaines...Les tests de suivi des jeunes au sein des pôles édités il y a quelques années allaient dans ce sens puisqu'il fallait atteindre des performances minimales dans chacun des domaines proposés (minimas qui existent peut être encore aujourd'hui d'ailleurs).
 
Seulement, cette vision de la préparation physique ne prend pas en compte les qualités naturelles de chaque joueur, et surtout impose au corps un travail qui est souvent contradictoire : en effet, comment être rapide et endurant ou fort et souple en même temps ?
 
De plus, les besoins physiques ne vont pas être les mêmes en fonction du style de jeu : un terrien frappeur de fond de court ne va pas avoir les même besoins en terme de qualité physique qu'un joueur de surface rapide tourné vers l'attaque. De la même manière, un joueur montant beaucoup devra travailler la vitesse de déplacement vers l'avant quand un lifteur de fond de court soignera son déplacement latéral et son endurance...
 
Vouloir créer un athlète complet n'a pas de sens en préparation physique. On en peut pas être à la fois le meilleur sprinteur du monde et le meilleur sur marathon. De ce fait, il ne faut pas parler de performance maximale mais de développer des performances optimales qui vont permettre au joueur d'utiliser ses propres atouts physiques sur le terrain.
 

Donner la priorité à la santé de l'athlète

 
Il existe une autre priorité à la préparation physique : préserver l'intégrité physique des athlètes, en d'autres termes , lutter contre les blessures. Cette priorité (qui devrait être en réalité la seule priorité) est de plus en plus oubliée dans les différentes structures et même dans le sport de haut niveau où il existe une distinction entre le préparateur physique garant des performances, et le staff médical, garant de la santé des athlètes.
 
A fonctionner de cette manière, on ne s'occupe de la santé des joueurs que dans un soucis de récupération... ou une fois blessés.
 
C'est un non sens : le travail prioritaire d'un préparateur physique doit être de préserver la santé physique des athlètes dont il a la charge, de mettre en place un programme permettant de supporter la charge de compétition et d'entraînement.
 
Seulement, cette vision n'est que peu prise en compte dans les entraînements. Comment expliquer sinon l'apparition de pathologie de plus en plus précoces, en particulier au niveau de la hanche et de l'épaule alors qu'un renforcement approprié et ce dès le plus jeune âge pourrait limiter leur apparition ?


Conclusion

Le problème essentiel de mentalité en France au niveau de la préparation physique est essentiellement un problème de mentalité et de croyance. 

Mentalité car le jeu et l'apprentissage technico-tactique ont pris le pas dans les clubs sur l'éducation sportive. Croyance car pour la majorité, préparation physique doit rimer avec performance et des « normes » à atteindre et ce parfois au détriment de la santé du joueur.

Si bien sûr, l'augmentation des capacités physiques du joueur (ou le maintien en fonction de l'âge et de l'avancée de la carrière) va être un des objectif mais seulement pour le préparer à l'effort que va demander la compétition), il ne faut pas mettre de coté le fait de préserver l'intégrité physique du joueur.

Pour cela, le préparateur physique doit être en permanence à l'écoute de son sportif et/ou guetter toutes les informations pouvant prévenir de l'avènement d'une blessure. De plus, il doit chercher à analyser le jeu de son athlète afin d'en dégager les exigences en terme de contraintes musculaires, articulaires et énergétique.

Il fondera ainsi sa programmation non pas par rapport à un idéal tennistique, mais en fonction des réels besoins du joueur, ce qui assurera à la fois de meilleurs résultats, mais également un plus grand investissement du joueur qui va ressentir les effets directement sur le terrain.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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Commentaires :

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  • Votretennis dit :
    02/11/2013 à 14h 54min

    Bonjour totophe, il ne faut pas confondre une équivalence qui était accordée aux STAPS qui était l'équivalent du tronc commun BE1 pour le DEUG et BE2 pour la licence et qui demandait donc de passer le spécifique pour valider le diplôme. Après effectivement, sauf à avoir un Staps avec option tennis, une formation complémentaire est bien évidement nécessaire, mais ce qui me dérange aujourd'hui c'est le fait que toute équivalence ait été supprimée, comme si la formation STAPS n'avait aucun rapport avec l'enseignement du tennis...

  • totophe dit :
    02/10/2013 à 12h 12min

    Concernant les equivalence des staps pour le DE je trouve que les etudiants staps manquaient de competences dans le domaine de l'initiation et du perfectionnement tennis.